mardi 26 novembre 2013

Ambroisie.

A lire avec ceci :





Le moteur vrombit comme un félin hargneux. La bécane hurlait de plaisir, dévorant l’asphalte avec vigueur. Le conducteur sentait les bras de sa passagère se resserrer contre sa taille, guidés à la foi par l’appréhension et l’excitation du moment. Les ongles noirs de la jeune femme s’agrippaient au cuir de la veste de celui qui tenait sa vie entre ses mains. Et elle trouvait ça diablement endiablant.

Ses cheveux fouettaient l’air avec violence, le vent cinglait sa peau dénudée et faisait gonfler son débardeur comme la voile d’un bateau. Elle avait l’impression qu’elle allait s’envoler, qu’ils allaient tous les deux s’envoler.
Elle blottit son visage dans le creux de la nuque du motard, laissant le paysage défiler en tâches floues orange et jaune.
Indirectement, elle absorbait chaque parcelle de la route, chaque creux, chaque fissure, chaque particule de bitume. Son corps ne devenait qu’une extension de la machine, épousant les courbes du cuir de la selle comme de la veste de celui qui la conduisait au paradis.
Le mugissement de la bécane se fit decrescendo avant de s’arrêter doucement.
La jeune femme descendit de l’engin, suivit de prêt pas son conducteur qui retira son casque et replaça ses longs cheveux châtains. L’homme eut un sourire heureux en jetant au sol sa veste et ses gants.
Et puis ?
Et puis rien.
Ils restèrent là plusieurs minutes, à s’imprégner. Les pins gigantesques les enfermaient dans ce qui semblait être l’endroit le plus retiré du monde. Le ciel était d’un bleu tranchant, presque blessant pour l’œil, uniquement percé de quelques cumulus lascifs. L’air était glacial et des volutes de fumée s’échappaient des lèvres bleuies de la jeune femme.
Puis tous deux s’entreregardèrent et, sans un mot, ils surent que c’était l’instant.
Le jeune homme retira son t-shirt en lin, puis son jean. Son accompagnatrice retira son débardeur, son pantalon et tout ce qu’elle portait pour le rejoindre. Ils se prirent la main et se mirent à courir. Leurs pieds s’enfonçaient dans l’humus frais et les fougèrent caressaient leurs mollets nus.
Et puis ?
Et puis ce fut l’impact.
Leurs corps entrèrent brusquement en contact avec le lac. L’eau éclaboussa les deux  fauteurs de trouble. Quelques oiseaux décolèrent de leur perchoir alors qu’ils s’immergeaient totalement dans l’eau turquoise du lac.
Le bruit ne fut alors plus qu’un lointain souvenir.
Ils ouvrirent les yeux dans l’eau claire et leurs doigts s’enlacèrent plus fort encore.
Lorsque leurs poumons parurent imploser, ils s’extirpèrent de l’eau avec vigueur, se rappelant à regret de la fraicheur de décembre, le visage hors de l’eau brûlante.
« Roxane ? »
Elle tourna son doux visage vers lui, ses grands yeux bleus attentifs.
« Là je me sens bien. »
Elle eut un sourire doux et caressa son torse tatoué. Elle ne dit rien. Ils se laissèrent flotter à la surface du lac, le dos réchauffé par la source bienveillante, la face frigorifiée par l’agressif climat norvégien.
Et puis ?
Et puis le temps fut distendu.
Ils restèrent là des heures à ne contempler que ce carré de ciel bleu découpé par la cime des pins, à inonder leur rétine de cette nature à couper le souffle, à s’exposer dans la plus grande faiblesse humaine à ce monde si imposant, si dominant.
Ils se sentaient deux fœtus dans l’utérus du monde.
Le corps immergé dans le plus berceau sein de la planète.

Roxane fut la première à sortir de l’eau.
Il la suivit sans rien dire, admirant son dos paré de mille dessins à la signification si particulière, si précise que la jeune femme devenait une longue histoire à découvrir, parcourir, relire encore et encore jusqu’à la connaître sur le bout des doigts.
Ils se séchèrent puis allumèrent un immense feu.
Prise par une certaine pulsion, Roxane se leva et, vêtue d’un pantalon souple et d’un gros pull, commença l’ascension d’un arbre.
Et puis ?
Et puis il la suivit, bien sûr.
Ses mains s’agrippèrent à l’écorce rêche du pin, ses pieds s’appuyaient sur les branches, son front effleurait le bout des aiguilles. La grimpe fut longue et éprouvante. Mais Roxane ne s’arrêta pas une seule seconde. Elle ne trembla pas un seul instant, n’hésite pas une simple fois. Elle avait la lune dans le viseur et rien ne l’empêcherait de s’y accrocher.
Après de longues minutes, ils atteignirent le sommet qui ploya quelque peu sous leur poids. Roxane eut un sourire malicieux.
« C’est magnifique » souffla-t-il. « N’est-ce-pas ? »
Et puis ?
Et puis elle ne répondit rien.
Elle observait les centaines de milliers d’étoiles qui s’étendaient là haut, parant la voûte céleste de ses plus beaux diamants. Elle ne répondit rien, comme à l’accoutumée.
Elle ne répondait rien.
Il lui vola un baiser salé.
Elle pleurait de ne pas lui répondre.
Elle pleurait pour sa voix.

Roxane la muette se noyait dans l’océan étoilé qu’était le ciel de la Norvège.

samedi 16 novembre 2013

Tu attends un train.

YOYOYO.
Me gusta Esteban.
Bref ce type gère.
Et la gare abandonnée de Chantilly aussi !
















Et les petits photomontages pour la fin ♥